Monday, August 28, 2006

Pauvreté esthétique

« Je me suis retrouvée à discuter avec les responsables de la deuxième chaîne de télévision marocaine, en 2000 et en 2001, et à les supplier de faire quelque chose pour que l’intoxication des masses marocaines par les propositions audio-visuelles venues de la zone arabe moyen-orientale égyptienne cessa actuellement. Non seulement ils sont restés de marbre, mais ils ont eu l’audace de me dire que "les Marocains et, surtout, les Marocaines aiment ça ! " »

EL KHAYAT, Rita, Questions Arabes, Réflexions Tome III, Ed. Aïni Bennaï, Casablanca, 2004, p.45

Sunday, August 27, 2006

On orientalism...

Orientalism is but a cultural racism. Many people who wrote about the Orient depicted people living there (mainly Arabs) as dirty, untrustworthy and extremely violent people. Hence, justifying colonialism in the 19th and 20th century, and being the raison d'être of neo-colonialism nowadays...

The perfect recipe for this Machiavellian project also includes colonial schools where locals (mainly the children of the elite) will be taught how to despise their own people as they learn that the locals are of a lesser breed and have lower moral standards, and that the occupiers are but lovable and admirable heroes and saviours.

Jaafar. A.

Thursday, August 24, 2006

Rumi: جلال الدين الرومي

ما أسعد تلك اللحظة حين نجلس في الإيوان، أنا وأنت!

نبدو نقشين وصورتين، ولكننا روح واحدة، أنا وأنت!

إن لون البستان وشدو الطيور يَهَبُنا ماءَ الحياة

في تلك اللحظة التي نذهب فيها إلى البستان، أنا وأنت!

وتُقبِل نجومُ الفلك رانيةً إلينا بأبصارها

فنجلو القمرَ نفسَه لتلك الأفلاك، أنا وأنت!

أنا وأنت، من دون أنا وأنت، نبلغ بالذوق غاية الاتحاد

فنسعد ونستريح من خرافات الفرقة إلى أنا وأنت!

وسيأكل الحسد قلوب طيور الفلك ذات الألوان الباهرة

حينما تشاهدنا نضحك جذلَين على تلك الصورة، أنا وأنت!

جلال الدين الرومي

Wednesday, August 23, 2006

Photos commentées: L'Internationale contre l'oppression

Warsaw Ghetto, Early Twentieth Century
Un ghetto à Varsovie, au début du 20ème siècle


Chiapas Indians Vs. Mexican Army, Late Twentieth Century
Les indiens de Chiapas contre l'armée mexicaine, fin du 20ème siècle



Tibetans Vs. Chinese Rule, Late Twentieth Century
Les Tibétains contre le régime chinois, fin du 20ème siècle



Vietnamese civilians Vs. U.S. military, Mid-Twentieth Century
Des civils vietnamiens contre l'armée américaine, seconde moitié du 20ème siècle



Black South Africans Vs. Apartheid, Mid-Twentieth Century
Des noirs sud-africains contre le régime de l'Apartheid, seconde moitié du 20ème siècle



Native America VS. U.S. Cavalry, Nineteenth century
Des natifs américains contre la cavalerie américaine, au cours du 19ème siècle



African-Americans, Post-Civil war
Des afro-américains après la Guerre Civile américaine




Source



Commentaire libre :


Plus qu'une nationalité, "palestinien" est une identité: celle qui lutte contre l'oppression et l'occupation, la privation de liberté et le totalitarisme -indépendamment de l'idéologie qui l'inspire et des meurtriers qui en sont les outils ("Même riches, même civilisés", écrivait Tareq Ramadan récemment dans son article "Toute honte bue" )

"Palestinien" est une solidarité, un rempart contre la barbarie, un gage de liberté, une lutte contre l'un des derniers bastions du colonialisme et une vision favorable à l'écroulement des idéologies de la haine et de la destruction.

Abraham Serfaty écrivait en 1969 dans la revue Souffles:

« Les événements de mai 1968 en France ont fait nettement éclater, dans la Société capitaliste, l'antagonisme entre deux attitudes de l'Homme, entre deux démarches «culturelles». Avoir sa tête «dans les étoiles», ou chez «Control Data» résume parfaitement cet antagonisme.

A vrai dire, il n'est pas spécifique au mouvement de Mai français. Le même antagonisme se retrouve chez le paysan vietnamien qui doit garder «la tête dans les étoiles» pour abattre, avec un vieux fusil, ou même à l'arbalète, l'hélicoptère américain ultra-moderne, dont le pilote n'a lui, plus de tête, mais qui n'est plus qu'un rouage d'une organisation dont la tête est bien, effectivement, chez «Control Data».

Mais le paysan vietnamien, de même que le commando palestinien, préfigure, et autrement que le spécialiste à tête froide de l'entreprise américaine, l'homme de demain.


La société future sera une Société de créateurs ou ne sera pas. »


Tels sont les attributs du "palestinien" aujourd'hui!!


Jaafar AMARI

Translation and conflict

Translation and conflict. A narrative account


Traducteurs et interprètes sont souvent présentés comme des « passeurs » dont la médiation serait, par essence, propre à favoriser le rapprochement entre les sociétés. C’est oublier qu’ils sont amenés à sélectionner et manipuler les textes, discours, etc., qu’ils traduisent de diverses manières, en fonction du contexte où ils interviennent. Dans les situations de conflit, ces manipulations prennent des formes exacerbées.

Mona Baker, professeur de « traductologie » (translation studies) à l’université de Manchester, rappelle que « la traduction et l’interprétation font partie de l’institution de la guerre et jouent par conséquent un rôle essentiel dans la gestion des conflits, tant du côté des militaires et de leurs partisans que de celui des militants pacifistes ». Ces deux activités contribuent, de manière souvent décisive, à l’élaboration de toutes les formes de récits (narrative) qui « sont un moyen essentiel de générer, d’entretenir et de représenter les conflits à tous les niveaux de l’organisation sociale ». Les analyses de Mona Baker sont étayées d’exemples tirés des conflits contemporains, notamment au Proche-Orient

Richard Jacquemond

Tuesday, August 22, 2006

Une gauche endormie par l’hypocrisie impériale

« L’attitude qu’on pourrait appeler religieuse, et qui est très forte tant chez les « nouveaux philosophes » que dans le discours du président des Etats-Unis Georges W. Bush, consiste à voir le Mal et le Bien comme existant « en soi », c’est-à-dire indépendamment de circonstances historiques données. Les « méchants » -Hitler, Staline, Ben Laden, Milosevic, Saddam Hussein, etc.- sont des diables qui sortent d’une boîte, des effets sans cause. Pour combattre le Mal, une seule solution : mobiliser le Bien, l’armer, le sortir de sa léthargie, le lancer à l’assaut. C’est la philosophie de la bonne conscience perpétuelle et de la bonne guerre sans fin. »

BRICMONT, Jean, « Une gauche endormie par l’hypocrisie impériale », Le Monde Diplomatique, Août 2006, p.28


Sunday, August 20, 2006

Saïd, le temps d'un concert ...

Saïd*, le temps d'un concert ...

Par Jaafar AMARI



Présents lors du festival de luth à Bruxelles, Saïd Chraibi, Naseer Shamma et Marcel Khalifé ont livré une prestation remarquable, digne des maîtres qu'ils sont.

Abritant le festival de luth, Bruxelles vibre désormais au rythme des cordes de cet instrument mythique dont les notes chantent une humanité oubliée, presque jetée aux oubliettes, sacrifiée sur l'autel de la " libre circulation des marchandises et des capitaux ". Cherchant l'art dans la vie et la vie dans l'art, chaque note se liait à celle qui la précédait et anticipait celle à venir, dans une mysticité légendaire du temps où la foi ne portait point les armes.

La musique, transmise par des passeurs de savoir, aide à construire des ponts, à établir des liens entre plusieurs rives, plusieurs civilisations, afin de converger vers une culture universelle, symbole de l'unité dans la diversité. Prononcé avec véhémence et éloquence, ce discours musical soulignait ce qu'il y avait de plus intangible chez l'être humain : la créativité spontanée.

Diplomates d'une autre trempe, nos musiciens livrent un message d'une importance cruciale, au moment même où la République française vit une série d'émeutes marquées par une violence rare. Au-delà des tenants et aboutissants de ces troubles, ils ont mis en exergue cette phrase de Malraux, toujours aussi véridique : " l'objectif de l'art est d'ouvrir les yeux du peuple à la beauté comme aux liens entre l'art et la liberté. " La musique adoucit les mœurs, représente un rempart contre la haine, la violence et le racisme, rejette la xénophobie et stigmatise l'enfermement, le communautarisme.

Les morceaux se suivent, toujours chaleureusement applaudis par un public ouvert d'esprit -une humanité sur laquelle on pourrait éternellement parier, tellement elle serait incapable de fabriquer une bombe. En ces temps d'amalgames et d'incompréhensions, de peurs et de malentendus, la musique vient éclairer la voix de l'entente et du vivre ensemble harmonieux. Elle vient concilier des pôles et des forces aux tendances différentes, presque contradictoires : la profondeur et la vitesse, la spiritualité et les impératifs de la vie, la contemplation et l'action. On sent qu'il y a quelque chose. Quelque chose que l'on n'a pas invité et qui survient ; quelque chose qui ne se reproduira pas, même si on la répète, et qui n'apparaît que pour révéler une autre réalité inattendue et surprenante, dévoiler une frontière incertaine où la vie se conjugue au mystère du temps qui s'écoule, afin de rompre son protocole. Les notes se jouent (de nos esprits !), l'atmosphère est paisible, le temps suspendu et le silence audible : le culte et l'amour du beau deviennent une éthique, un code de conduite, une médiation agissante...

Naseer Shamma, voix d'un peuple meurtri, injustement occupé et spolié de ses terres et de ses richesses, offrait à un public émerveillé certains de ses meilleurs morceaux. Alors que Bagdad subit les humiliations de l'occupation, son enfant éternel essuie ses larmes, la cajole et l'aime par le biais de son luth. L'artiste se distinguera également grâce à un morceau dédié à un Garcia Lorca qui écrivait, dans sa Casida de la rose : " la rose ne cherchait ni science ni ombre ; Confins de chair et de songe, elle cherchait autre chose. "

Puis c'est le tour de Marcel Khalifé, artiste carrefour, à la croisée des chemins. Cet infatigable combattant de la liberté promène sa voix pour chanter la paix, exhorter les gens à refuser la misère, la tyrannie et son corollaire, l'injustice. Á l'instar des grands compositeurs et artistes, Marcel n'a pas vu l'âge avoir prise sur sa ferveur militante.

Point commun de marque entre les trois artistes : le concert commence toujours par une phase où ils caressent leurs instruments ; peut-être ils les provoquent, pour se réconcilier après. Après, quand la fusion et l'amalgame auront eu lieu, l'artiste et l'instrument devenant maîtres l'un de l'autre, pour ne briser ce lien qu'à la fin : ayant atteint un sommet de l'aveu, du désir ressenti, exprimé et partagé, ils ont besoin, afin de se retrouver, d'un refuge dans la solitude, pour que, séparément, ils puissent recouvrer l'autonomie, la souveraineté.

Naseer allait clore son concert par un morceau sublime, intitulé 'Enfance', qui est le témoignage musical d'un crime : la mort de milliers d'enfants irakiens, tout au long des quinze dernières années. Hymne à une enfance déchirée, ce morceau est une diatribe contre tous les responsables du drame actuel : les Etats-Unis, l'ancien régime irakien, l'ONU, le Conseil d' (in)sécurité… Diatribe, mais surtout message d'espoir, derrière un sourire serein, 'pour que l'écho de notre musique dépasse celui des bombes'. Certes, Naseer. Certes…

*: Saïd, prénom de l'artiste Saïd Chraibi, signifie 'heureux' en arabe. Le titre étant un jeu de mots, utilisant le prénom de l'artiste pour faire référence à une joie ressentie.

(Novembre 2005)

Saturday, August 19, 2006

Août - Septembre

MANIÈRE DE VOIR (Le Monde diplomatique) n° 88 Août-septembre 2006

Cinémas engagés


INTRODUCTION

Caméras politiques. Ignacio Ramonet


I. Face à la guerre

Les (si pieux) mensonges du cinéma. Edgar Roskis
Redécouvrir "Le Cuirassé Potemkine". Lionel Richard.
Actualité de la guerre d'Espagne. Carlos Pardo.
Indécente réhabilitation de Leni Riefenstahl. Lionel Richard.
Variations sur l'occupation. Joseph Daniel.
En U.R.S.S. au temps de la guerre froide. Marc Ferro.
"Phobies jaunes" à Hollywood. Jean-Pierre Jeancolas.
L'apocalypse nucléaire vue d'Amérique. Anne-Marie Bidaud.
Filmer le conflit du Vietnam. Ignacio Ramonet.
"Apocalypse Now" ou la fuite dans le symbole. Christian Zimmer.
"Tsahal", défense et illustration de l'armée israélienne. Amnon Kapeliouk.


II. Miroir des sociétés

A Haïfa, la créativité palestinienne s'impose. Kenneth Brown.
Israël entre Intifada et pauvreté. Shlomo Sand, Levana Frenk.
Paradoxes iraniens. Javier Martin, Nader Takmil Homayoun.
Quand l'Algérie misait sur son jeune cinéma. Mouloud Mimoun.
La Noir dans le cinéma blanc. Marie-France Briselance.
"Titanic" et la lutte des classes. Thomas C. Frank.
Présence du Québec caméra au poing. Roger Bourdeau.
Tandis que l'Argentine plonge, son cinéma revit. Josefina Sartora.
Regards acides sur la société britannique. Gareth McFeely.
Mais où sont les "salauds" d'antan ? Vincent Chenille et Marc Gauchée.
Le drame intérieur du Danois moyen. Dorthe Wendt.
Renaissance méconnue du cinéma russe. Sylvie Braibant.
L'Inde entre Bollywood et les indépendants. Vojtech Janyska, Ophélie Wiel.
En Corée, l'esprit du Minjung souffle-t-il encore ? Gönül Dömnez-Colin.
Pour croire en l'avenir de l'Afrique. Thérèse-Marie Deffontaines.


Treize films témoins

Le voleur de bicyclette. Alain Brassart.
Le sel de la terre. Régis Dubois.
Gare centrale. Mehdi Derfoufi.
La mort aux trousses. Civan Gürel.
Main basse sur la ville. Francesca Leonardi.
Docteur Folamour. C.G.
L'Aveu. A.B.
Punishment Park. M.D.
Sweet sweetback's Baadassss Song. R.D.
L'une chante l'autre pas. Taline Karamanoukian.
Repentir. Kristian Feigelson.
Pluie noire. Jean-Marc Genuite.
L'arriviste. Florence Michèle Bergot.


Filmographie historique

Auteure Geneviève Sellier
La guerre de 1914-1918
La révolution bolchevique
Le fascisme italien
Le nazisme
La seconde guerre mondiale
L'extermination des juifs
L'occupation allemande en France
La guerre froide
Colonialisme et décolonisation

Friday, August 18, 2006

Zakiya Sekkate, PDG d'Oxyplast

Précurseur au féminin

Il y a seize ans, cette chef d’entreprise misait déjà sur Tanger.

« Aujourd'hui, un industriel peut arriver avec ses machines, trouver un terrain aménagé et commencer à travailler. Il m'a fallu trois ans de démarches et de travaux pour entrer en production. » Zakiya Sekkate ne tarit pas d'éloges sur Tanger, où elle s'est installée voilà plus de seize ans. Née à Fès dans une famille bourgeoise de neuf enfants, formée en Belgique et en France, cette ingénieur en pétrochimie a monté de toutes pièces une usine de fabrication de peinture en poudre, un revêtement de haute technologie utilisé pour l'électroménager, les pipelines et les gazoducs, le fer à béton et le mobilier en métal. « J'ai choisi Tanger pour son port international, à 15 kilomètres de l'Europe. Sa situation géographique permet de desservir les principales villes du Maroc en moins de douze heures. Avec l'autoroute, il est possible de livrer les clients dès qu'ils expriment leur demande. Le port Tanger-Méditerranée nous ouvre d'autres horizons... »

La quarantaine énergique, Zakiya Sekkate emploie cinquante personnes et exporte en Algérie et en Tunisie. En association avec ses trois frères, tous ingénieurs, elle investit dans une deuxième usine au Qatar - « petit pays qui représente à lui seul la consommation de tout le Maghreb ! » - et à Mohammedia, entre Casablanca et Rabat, dans une nouvelle niche de l'industrie chimique complémentaire aux peintures en poudre. Zakiya Sekkate, l'une des seules femmes dans l'industrie à Tanger, est convaincue que l'entreprise n'est pas le lieu où doit se livrer le débat homme/femme : « Je ne me suis jamais sentie victime de discrimination sexuelle. J'ai dû avancer au coude à coude pour me faire une place, en jouant de ma force de conviction. J'ai eu les mêmes difficultés que n'importe quel investisseur. J'ai subi les exigences des banques tant que je constituais un risque, mais depuis que je génère des revenus, c'est moi qui pose les conditions. »

Militante assidue de la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM), le patronat marocain, elle a refusé de rejoindre l'Association des femmes chefs d'entreprise du Maroc (Afem) au moment de sa création. « La vraie question porte sur les compétences, pas sur les quotas. Mon combat, c'est la formation et la mise à niveau pour le développement du Maroc à l'international. »



Saïd, Leïla, « Précurseur au féminin », Jeune Afrique l’Intelligent, N°2376, 23-29 juillet 2006, p.45

L'orientalisme, un racisme culturel

L'orientalisme, un racisme culturel

"Je considère que l’orientalisme est un racisme culturel. Mais c’est souvent en l’Autre que l’on se regarde. On ne voit même jamais de Soi qu’une image inversée dans un miroir et donc c’est une vision obligatoirement artificielle. C’est l’Autre qui me regarde comme je suis « réellement », car je ne me vois jamais que dans un reflet ou dans le regard et l’autre de ce quelqu’un d’autre que moi-même. C’est le fameux stade du miroir découvert par le psychanalyste Jacques Lacan quand il observa que l’enfant ne s’autonomisait vraiment que lorsqu’il apercevait son reflet dans un miroir, ou mieux, dirai-je en tant que femme, dans les yeux de sa mère : « C’est donc moi, je me reconnais et je m’admets comme tel… » "


El Khayat, Ghita, Questions arabes : La Nakba arabe, le désastre, Ed. Aïni bennaï, Casablanca, 2003, p.131


"Non" aux institutions mondiales

"Non" aux institutions mondiales


Jusqu’à quand nos États vont-ils se laisser berner par le Fonds monétaire international (FMI), la Banque mondiale (BM) et l’Organisation mondiale du commerce (OMC) ? Comment peut-on se réjouir en apprenant que ces fameuses dettes remboursées depuis des décennies ont été comme par magie effacées ? Combien de pays la BM a-t-elle déjà développés ? Combien de pays le FMI a-t-il sortis de la pauvreté ? Lorsque les Tigres asiatiques ont connu de terribles secousses au cours des années 1990, le DR « M » (Mohamad Mahatir), l’ancien Premier ministre de la Malaisie, a eu le courage de dire « non » à toutes les institutions occidentales. La Malaisie a-t-elle disparu pour autant ? Jusqu’à quand allons-nous croire que notre salut (pays du Sud) passera nécessairement par des compromis sans cesse humiliants, avilissants, par ces contrats léonins avec les clubs de Londres et de Paris ? L’opposant Abdoulaye Wade disait à son adversaire Abdou Diouf que le peuple ne mangeait pas de la macroéconomie. Il serait bon de temps en temps que nos princes s’en souviennent.

GISORS, Obambé Gakosso, «"Non" aux institutions mondiales », Courrier des lecteurs, Jeune Afrique l’Intelligent, N°2379, 13-26 août 2006, p.153

Poème de fin d’année dans Beyrouth entrelacée…

« Poème de fin d’année dans Beyrouth entrelacée… »

Extrait :


"La brutalité de la fin, Mon Amour,

Entre les draps bleus de la mer, au levant.

Lancinante la vague qui l’abat contre toi,

Falaise douce et voix de sucre,

Le miel de ta salive au bord de mes lèvres.

Regarde, Mon Amour,

Beyrouth bercée et bruyante,

Belle et bavarde,

Rangée le soir comme les jouets

D’une petite fille sage,

Tandis que les démons déferlent,

Dans les décombres,

Et entreprennent les sabbats de la démence

En la compagnie éblouie des morts.

De Beyrouth crucifiée,

Clouée au pilori et désarticulée sur la roue,

Regarde les Rois phéniciens se lever de leurs tombeaux obscurs.

Ils ne connaissent de la ville

Ni ses portes ni sa montagne

Ramassée sur les blessures des cèdres.

Ils remettent les clefs de la cité

Aux succubes

Qui visitent parfois les Beyrouthins endormis.

Au milieu des âmes des revenants

Qui n’ont jamais quitté Beyrouth,

Beyrouth prostituée qui ne se vend

Qu’aux poignées de dollars.

Liftée et maquillée,

Parfumée et aguicheuse,

Elle a voulu faire oublier qu’elle était vieille,

Si vieille, délabrée et ruinée,

Edentée et meurtrie.

Ses ecchymoses visibles sur les milliers de fenêtres vides

De ses immeubles disloqués.

Je ne t’aime pas, Beyrouth, mon Amour,

Pâmée entre mes bras.

Je caresse ta poitrine et prends

Ta tête que j’adore, entre mes mains au bout desquelles

La sensibilité est devenue

La clématite bleue et la rose de Saâron que je jette à tes pieds

Célébrant dans la passion la plus folle

Ma terrible envie de ta douceur,

A mon côté allongée."


El Khayat, Rita, Questions arabes : Aujourd’hui, l’acuité des problèmes, Ed. Aïni bennaï, Casablanca, 2003, p.153

Tuesday, August 15, 2006

سمر المزغني La tunisienne

تونس - اخلاص القاضي - دخلت القاصة التونسية «سمر المزغني 17 عاما» كتاب غينيس «للارقام القياسية مرتين» «كاصغر كاتبة قصة قصيرة في العالم» و«الكاتبة الغزيرة الانتاج الاصغر في العالم» في عامي 2000 و2002 وهي تحمل في طيات قصصها نمطا يبتعد عن «التزييف اذا ما ادرك الاطفال واقعهم».
ونأت في سردها القصصي كما تقول لوكالة الانباء الاردنية منذ ان بدأت الكتابة في ربيعها السابع بجسد صغير نحيل عن كل ما يمكن ان «يجرح حساسية الطفل» وعن «قصص الجميلات والساحرات الشريرات» التي فاضت بها موضوعات ادب الاطفال في المكتبة العربية فيما اقتربت كتاباتها من واقع يعيد بناء الطفل بشفافية الحلم القابل للتحقيق بواقع 100 قصة.


«عرفان» اول قصة نشرت لها في عام 1997 ليصل نتاجها الادبي اليوم الى نحو 100 قصة تبرعت بريع بعضها الى «ارامل وايتام شهداء الانتفاضة الفلسطينية».. ونشر نتاجها الادبي فيما يزيد عن مائتي جريدة ومجلة تونسية وعربية ولها قصائد باللغتين العربية والفرنسية منحت عن بعضها العديد من الجوائز وشهادات التقدير والاوسمة كما راسلها العديد من زعماء العالم والقادة العرب تشجيعا لها فيما اطلق اسمها على صالون ثقافي في تونس. «صديقة».. «غدوت نملة».. «عصفور فلسطيني فقد امه» .. «عندما تمطر السماء» اسماء بعض من قصصها فيما تعتبر قصة «ايها الشريف ننحني لتمر بعصاك» كما تقول الاقرب الى وجدانها اذ اهدتها الى روح والدها في الذكرى السنوية الاولى لرحيله.


تؤمن «المزغني» بثقافة التغيير «التي تسهم بها وسائل الاعلام حين تسلط الضوء على قصص نجاح اطفال العالم العربي بل وتتبنى اصحابها لتكون منطلقا لاعداد اجيال قادرة على تحمل مسؤولياتها بواقعية وادراك كما تعتقد.
سيبقى الطفل حاضرا في وجدان «المزغني» وستستمر بالكتابة عنه وله كما تنوه حتى لو اضحت عجوزا في الستين «فبداخلها طفل لا يكبر بل يتعلم دائما كيف يكبر».

Saturday, August 12, 2006

L'empire de la peur امبراطورية الخوف

"الخوف حفر فيّ مثل الجرافة داخل أعماقي بقلبي بروحي بعيني بأذني، فلا أرجف من البرد ولا من الجوع بل أرجف من الخوف"


محمد الماغوط..

Thursday, August 10, 2006

'Is the whole world against Palestine?'

'Is the whole world against Palestine?'

As the Middle East crisis deepens, former Durham University student Yousef Al-Hajjar describes how life has become almost intolerable in Gaza.

YOUSEF al-Hajjar was born in Gaza City in 1981 and grew up in a middle-class family with four brothers and three sisters - a typical Palestinian family. Last year, Yousef obtained a scholarship from the Durham Palestine Educational Trust to study for an MA degree in Arabic/English translation at Durham University. Today, he lives in a rented flat in Gaza with his wife, Samar, and five-month-old son Mohammed.

He has not been paid for his part-time lecturer post for four months because of the financial crisis which has hit the newly elected Hamas-led government. He earns some money working as a freelance translator.
continued...


"LAST August while I was doing my MA degree at the University of Durham, I watched closely and waited earnestly for the moment the Israeli settlements were evacuated and checkpoints removed from the Gaza Strip. This gave me a lot of hope for peace in the region as the border with Egypt would be open and Israel would allow the Gaza seaport and airport to function. None of this has happened, except that the concentration camp in which the Palestinians live has become a little bigger.

Although my wife and I abstained from voting for either Fateh or Hamas in the Palestinian parliamentary elections on January 25, I worked as an assistant and interpreter with a long-term international observer. All international observers who visited Gaza testified that the Palestinian elections were fair and candid. However, the Palestinians were soon punished for democratically electing Hamas. America and the EU cut off their financial aid. As a result, civilians were the victims as they lost their salaries. The freezing of salaries for four months has left most Palestinian families sinking into debt.

The situation has worsened since the abduction of an Israeli soldier from a military outpost and Israel targeting everything Palestinian. It has targeted the few bridges in Gaza, the Palestinian Ministry of Foreign Affairs, the Palestinian Ministry of Interior, and the major Palestinian power station, which was built over a period of five years, at a cost of $150m.

Consequently, Gazans have been going through terrible conditions as power has affected the way people eat and live. Mothers buy the necessary foodstuffs on a daily basis as they cannot store anything in refrigerators and fear that food will perish quickly. People use candles, kerosene lamps and gaslights to light their houses. All the available batteries in order to listen to the news on the radio have been bought. Children are seen on the streets carrying small radios to follow breaking news.

Now the substantial question which has to be faced is why Israel targets civilian facilities and uses excessive force, killing children who constitute 52 per cent of the Palestinian population? A more crucial question is why the US has vetoed a resolution that condemns the Israeli carnage perpetrated by the Israeli occupation forces in the Gaza Strip? This leads to Palestinians not trusting or believing in the American assurances of allowing the Palestinians to create their viable state, when it gives Israel the green light to destroy the infrastructure of this prospective state.

We are badly in need of an unbiased super power that would bridle Israel, but as long as America is ruling the world, the Palestinians must not dream of anything. As George W Bush has reiterated many times: "Israel has the right to defend itself." But why don't the Palestinians have the right to defend themselves when they are attacked?"

Gazan Ahmed al-Madhoun, 30, says: "Has our world forgotten the footage of Huda Ghalyia, 12, who was moving hysterically among the dead bodies of her family at Gaza seashore? Has our world forgotten that Israel rejected the Arab peace initiative put forward by Saudi Arabia in the Beirut Summit in 2002? Has our world forgotten who killed our peace partner, Yitzhak Rabin and why?"

As I write, 24 Palestinians have been killed in the Gaza Strip without any condemnation from the world community. Many people are living in fear. We already have a harsh economic situation since Hamas won power, but now we are not safe on the streets or even in our homes.

My aunt's house was turned into an Israeli military barracks during a ground offensive in the north of the Gaza Strip. An Israeli tank tore down the wall of the house and bulldozed the trees. All the family members, including my aunt, uncle, and their daughters, were held in one room for two days until the troops pulled back.

When I called my aunt afterwards she said it had been her worst nightmare and that my cousins would never forget those two horrible days. "I wish my children could live like all other children - without fear," she says.

A university lecturer, his wife and seven of their children were killed when an Israeli F16 warplane dropped two bombs on their building, causing large-scale destruction and injuring 40 people from the nearby houses. Is this done because of the abduction of an Israeli soldier by the Palestinian resistance? What about the 10,000 Palestinian prisoners inside the Israeli jails (including 96 women and 313 children)?

Nabeel, a tailor, says: "This senseless destruction and these heinous crimes should have been prevented since they cannot guarantee the return of the snatched soldier to his family. Israel has taken this incident as an excuse to justify its actions. And now it is worse as the eyes have turned to Lebanon and the Israeli tanks can roll into any Palestinian town and kill innocent civilians. This is a serious situation as Israel can commit any crime without being punished."

Samah, a mother of six, says she has lost hope in the United Nations. "It cannot put an end to the crimes perpetrated by the Israeli soldiers in Gaza and the West Bank," she says. "Also, I lost all hope in Arab governments, who used to condemn the Israeli assaults against us, but now they are unable to deplore the killing of Palestinians. It seems that the whole world is against the Palestinian cause."

I have big dreams and hopes of furthering my education in America, but this depends on getting a full scholarship since I cannot afford the tuition fees. But, by this, I could escape the miserable conditions in Gaza. The Palestinians in Gaza are living in a big concentration camp, a big prison. Borders are closed, two thirds of the Gaza Strip has no electricity and there is a shortage of drinking water after the bombing of water and power plants.

But the question which keeps buzzing in my mind is: 'For how long will our world sit by and watch us being killed by the Israeli military machine?'

The Palestinians have been furious about the carnage perpetrated by Israeli warplanes in Qana, southern Lebanon, since they are the only people who can feel and sense what has really happened because it is the same American-made missiles and the same American warplanes that hit Gaza many times before and killed civilians.

I feel really bamboozled when I see the Americans paying the Palestinian Non-Governmental Organisations hundreds of thousands of dollars to help them hold workshops and training courses on democracy and human rights. But in the meantime, America itself rejects the Palestinian democracy that elected Hamas and also supports Israel to kill Palestinian and Lebanese children.

My son, Mohammed, is only five months old. He must have a better life."

Wednesday, August 09, 2006

Monde à deux vitesses et l'humiliation toujours du même côté

Monde à deux vitesses et l'humiliation toujours du même côté.


Par Jaafar AMARI

M. Elmandjra, le brillant érudit marocain, a bien accepté de donner deux conférences en Belgique, la première dans le cadre du Moussem d'Anvers, la deuxième à Bruxelles le lundi dernier (10 mai 2004). Le thème de cette dernière fut le dernier best-seller du Professeur Elmandjra, intitulé " L'humiliation à l'ère du méga-impérialisme ", qui en est déjà à sa 5ème édition, et dont la version arabe, " Al Ihana ", vient de paraître. L'écrivain s'est exprimé en présence d'un public assez nombreux, majoritairement composé de jeunes.

" La parution d’un livre, soutient l’auteur qui n’est plus à présenter, partage plusieurs points communs avec la naissance d’un bébé : c’est la même souffrance, mais avec toujours le bonheur et la délivrance au bout ". En effet, un livre est un feuilleton, un enchaînement d’idées, un cumul d’expériences. Il est, comme toute création humaine, le fruit de pensées, de privation de sommeil…L’humiliation est le thème principal du dernier livre de l’auteur. La préoccupation majeure du dernier ouvrage du Professeur « se résume en un seul mot : ‘humiliation’. Un bien ancien mal qui revient en force à travers le globe. L’humiliation est devenue une forme de gouvernance et un mode de gestion des sociétés sur le plan national comme sur le plan international. L’humiliation est selon le Robert l’action ‘d’humilier ou de s’humilier’» (1)

La Première Guerre Civilisationnelle

C’est en 1991 que M. Elmandjra s’est rendu compte, plus que jamais, de la véracité de toutes les analyses qu’il avait faites, et de toutes les thèses qu’il avait émises. Il se rendit alors compte d’une vérité fondamentale : nous vivons une guerre de valeurs. Et la problématique Nord/Sud n’est NI politique, NI économique. Le Sud souffre d’une crise de valeurs qui est la véritable cause de son sous-développement. Nous sommes en pleine crise internationale, et la guerre en Irak est sur le point d’être déclenchée. Bush Père prend alors le soin de confirmer les thèses de M. Elmandjra en affirmant lors de son discours précédent le début des hostilités : " Nous ne laisserons personne toucher à notre système de valeurs ". Son fils, 12 ans plus tard, reprendra la même phrase, dans le même contexte, à savoir la veille des hostilités. A partir de cette constatation, on est en droit de parler de « méga-impérialisme », qui tend à ignorer la culture de l’autre. Les dangers de l’uniformité ne sont plus à souligner. Et l’auteur, en ancien biologiste, d’affirmer : " J’ai été biologiste, et la principale chose que j’ai pu apprendre de cette expérience est la suivante : la diversité est indispensable pour la continuité, pour la survie même de l’espèce ". Une culture qui a une tendance obsessionnelle à dominer le monde tend à nier sa propre identité.

La même année, notre conférencier publie son livre « Première Guerre Civilisationnelle ». Les version française, arabe puis anglaise feront le bonheur de ses fidèles lecteurs. Dans ce livre, l’auteur explique comment les prochaines guerres seront PRINCIPALEMENT d’ordre culturel.

L’aliénation culturelle, source majeure de sous-développement

La différence entre les pays développés et ceux hypocritement appelés « pays en voie de développement » réside dans la présence ou l’absence d’analyses, de recherches scientifiques et d’études de la perspective, car prévoir, c’est savoir, afin de pouvoir. Dans les pays du tiers-monde, on a tendance à tout réduire à une personne, à développer le culte du personnage dont résulte la présence du pouvoir entre les mains d’une seule personne. « La décolonisation culturelle, un défi majeur pour le 21e siècle» est le titre d’un ouvrage paru en 1996, où M. Elmandjra développera cette problématique. Dans l’Introduction de cet ouvrage, on peut lire : « A Meknès, en 1953, un vieil homme demanda à être reçu par le Résident général de France. Le pays était alors en pleine effervescence car la France venait d'exiler Sa Majesté le Roi Mohamed V et d'importantes mesures de sécurité étaient prises à l'occasion des déplacements des autorités du Protectorat. L'insistance de notre Meknassi était telle qu'il parvint à rencontrer le Résident général et à lui transmettre le message suivant:

"Monsieur le Résident général, je suis venu vous dire que vous pouvez partir car la France n'a plus rien à faire au Maroc. Vous avez préparé une génération entière qui saura défendre vos intérêts mieux que vous-mêmes."

Il s'agit là d'une histoire véridique d'une grande valeur pour la compréhension du processus de la décolonisation. Trois ans plus tard, en 1956, année de l'indépendance du Maroc, au cours d'un vol qui me ramenait à Londres où je terminais mes études, un diplomate Syrien m'apporta un utile complément à cette précieuse leçon. Il m'expliqua que l'indépendance politique ne requierait en fin de compte que quelques minutes - le temps de signer un document juridique. Quant à l'indépendance économique, disait-il, elle nécessite plusieurs mois sinon quelques années selon le rythme des nationalisations et compensations financières. Le plus difficile par contre, insistait-il, c'était l'indépendance culturelle qui est l'affaire de plusieurs générations. » (2)

La Démocratie, source réelle de développement, implique la présence de plusieurs éléments qui interagissent entre eux en vue d’améliorer la société dans laquelle ils vivent. L’absence de cet élément dans la pratique politique des pays sous-développés n’est pas un hasard. Quand les droits sont bafoués, quand la liberté d’expression est confisquée, la créativité est nulle, et l’analphabétisme atteint un taux ahurissant. C’est malheureusement le cas des peuples arabes, qui assistent, le plus souvent impuissants, aux séries de génocides commis contre leurs frères musulmans, de la Palestine à la Tchétchénie, de l’Iraq à la Bosnie. Un jour ou l’autre, quand les opprimés verront la victoire se dessiner à l’horizon, nous regretterons notre mutisme, puisque, au moment du triomphe, les victimes se souviennent moins de la cruauté de leurs ennemis, que du silence de leurs amis. C’est le cas des peuples arabes, victimes de régimes corrompus et de présidents à vie ayant accédé au pouvoir par coups d’états ou par simple manipulation électorale et ne bénéficiant donc d’aucune base populaire.

La décolonisation réelle se passe dans l’esprit de chaque personne. Elle implique la connaissance de soi, de son passé et de l’héritage légué par ses ancêtres. Sa clé se trouve dans la réponse aux questions les plus fondamentales : Qui suis-je ? D’où est ce que je viens ? Je me dirige vers où ?. L’aliénation culturelle de nos dirigeants rend difficile toute tentative d’échapper à cette réalité.

La mondialisation

M. Elmandjra tient à rappeler qu’ " aucun musulman ne peut s’opposer à la mondialisation ". Les musulmans n’ont pas de complexe vis-à-vis de la mondialisation. D’ailleurs, la notion de « frontières » n’a jamais existé dans l’Empire Musulman. Tout être humain, là où il va, doit se sentir chez lui. L’auteur approuve ce concept, mais, tient-il à préciser, " qu’on ne vienne pas me vendre l’américanisation au nom de la mondialisation ! ". Il élaborera son point de vue sur ce défi dans son livre « Mondialisation de la Mondialisation ». La mondialisation qu’on nous propose n’est qu’une colonisation new look, une nouvelle forme d’asservissement et d’assujettissement, visant à rendre serviles les populations les plus pauvres. Cette pseudo-mondialisation est la réponse à ce que désirent les gros businessmans occidentaux : organiser un marché planétaire sans entraves pour que l’argent puisse se multiplier partout où il veut et comme il le veut, suivant la logique financière suivante : viser, de la manière la plus prompte et la plus infinie, le maximum de rémunération pour le capital. Or ni la vie, ni la nature, ni l’univers ne fonctionnent selon les lois du maximum et de l’infini ! C’est plutôt l’optimum, l’équilibre et le limité. Ce qui veut dire, pour l’entreprise, se contenter de réaliser des gains qui s’arrêtent là où nécessitent respect de la dignité des autres et intégrité de la nature. Rien de plus. Le glissement de l’économie vers le seul point de vue maximaliste financier et comptable mène là où nous sommes actuellement : ne plus pouvoir faire de l’argent que sur la spéculation, le chômage, la pollution, l’exclusion, la tricherie (les scandales financiers d’Enron et de Vivendi sont là pour en témoigner) et l’escroquerie. La création d’un marché planétaire poussera les entreprises à vouloir faire baisser les prix de revient par tous les moyens, afin de battre leurs concurrents sur le terrain de la consommation. Cela mènera indéniablement à des licenciements, des fermetures, des recentrages, des fusions, des déréglementations, des privatisations, et à l’élimination des programmes sociaux (pour transférer plus d’argent au secteur privé). Cette idéologie, qui répondait aux intérêts de la finance américaine désireuse de lever les obstacles à la libéralisation planétaire des mouvements de capitaux, a ensuite été imposée aux très nombreux pays « bénéficiaires » des prêts et des crédits des institutions de Bretton Woods par le carcan du « consensus de Washington ». Dans tous les cas, les peuples ont été sommés de se plier à des dispositions légitimées par des institutions internationales présumées au-dessus de la mêlée et, en raison de leur « expertise technique », porteuses des « seules politiques possibles ». A ceux qui défendent encore ce système – et qui sont, au mieux, de dangereux ignorants et, au pire, de criminels hypocrites, à ceux qui nous demandent de garder la tête dans le sable en niant la « paupérisation absolue », aux apôtres du néolibéralisme qui tentent de nous faire croire aux vertus salvatrices de la mondialisation, aux économistes et gourous du management –éternels complices- qui continuent à nous expliquer pourquoi il est rationnellement justifié de faire l’autruche, il est permis de répondre par cette simple question : n’avez-vous pas honte ?

Réalité politique dans le monde arabe

Le conférencier s’attardera ensuite sur deux notions, et deux mots qu’il a inventés : L’humiliocratie, c’est-à-dire, quand l’humiliation du plus faible devient une forme de gouvernance, et la pauvrocratie, c’est-à-dire, le fait de distribuer la pauvreté, au lieu de chercher à l’éradiquer en s’attaquant à ses racines. Au Maroc, ces simples chiffres parlent d’eux mêmes : les deux tiers de la population ont moins de 30 ans, et 60% des hommes politiques ont plus de 65 ans. Comment, dés lors, peut-on établir un équilibre entre ces deux « forces » ? Au Maroc, comme partout dans le monde arabe, les politiciens ne cessent de décevoir les jeunes, et le fossé séparant les deux devient de plus en plus grand. Les jeunes, dans ce cas-là, subissent la pire des humiliations, celle qu’on inflige à soi-même quand on s’abstient de réagir, quand on accepte son sort avec passivité, quand on incarne la « société de spectacle » dont parle Guy Debord. (3)

Une des plus grandes leçons de l’Histoire est que le plus fort cherche toujours à prouver sa suprématie par UN seul moyen : humilier l’Autre. Les Chefs d’Etats arabes sont humiliés par les Etats-Unis qui leur imposent leurs décisions. Ils cherchent, de leur part, à se « débarrasser » de cette humiliation en humiliant leurs ministres en fonction du mécanisme de « compensation » (dans le sens Freudien du terme), et ainsi de suite. Et, enchaînement oblige, c’est le peuple qui « reçoit » l’addition de toutes ces humiliations. Il est temps que les peuples arabes cherchent à se libérer, en faisant appel à cette force intérieure qui nous pousse à échapper à toute relation de servilité. Les Intifadates sont inévitables. Elles prendront des formes violentes, au départ de ce postulat évident : dans les pays totalitaires, les révolutions tendent à être plus sanglantes, car elles ont longtemps été réprimées.

L’auteur conclura sur ce qu’il appelle « la fin de l’exception marocaine », titre qui fait référence aux tristes événements du 16 Mai 2003. Le terrorisme, contrairement à ce qu’on voudrait nous faire croire, n’est pas le fruit d’une idéologie extrémiste de quelque religion que ce soit. Ce n’est pas par pur hasard si le terrorisme s’est développé dans le pays le plus misérable des pays musulmans, en l’occurrence l’Afghanistan, un pays où les gens vivent encore au niveau de la préhistoire. Les attentats du 11 Septembre, par exemple, sont moins liés à l’argent de Ben Laden qu’à la détermination des enfants de la misère et de la guerre, bien disposés à la revanche et au sacrifice. « Tant qu’à vivre comme un mort, je me donne la mort pour vivre ! ». Ce discours, quoique absurde, a séduit bon nombre de nos jeunes, et continue, malheureusement, de le faire. M. Elmandjra explique, chiffres à l’appui, l’écart énorme entre les riches et les pauvres au Maroc : en 1956, 10% des gens les plus riches gagnaient 10 à 12 fois plus que les 50% les plus pauvres. Aujourd’hui, 5% des plus riches possèdent 30% de l’ensemble des richesses. Les chiffres parlent pour eux-mêmes…

La décolonisation culturelle est le défi majeur que l’ensemble des peuples arabes sont appelés à relever, dans l’espoir de vivre des lendemains meilleurs. Elle doit commencer, comme toute action, dans l’esprit de chaque citoyen. Et elle nécessite la présence de trois éléments : D’abord, le sens du beau, c’est-à-dire, avoir une certaine sensibilité pour la beauté là où elle se trouve. « Dieu est beau, et aime la beauté ». Ensuite, l’Amour, c’est-à-dire, se sentir impliqué dans la vie de son prochain, être tellement proche de lui qu’on arrive à sentir les crispations de son cœur. L’Amour doit être une prière pratiquée au quotidien. La Compassion qui en découle est le facteur qui assure les liens affectifs dans une société. Et enfin, la dignité. On ne le répétera jamais assez : la dignité de la personne humaine doit être le moyen et la fin de tout développement. Elle est caractéristique de l’humanité. Ainsi, un homme cesse d’être un être humain dés lors qu’il a perdu sa dignité. En se comportant autrement, il devient un salaud au sens Sartrien du terme. L’auteur finira en évoquant son emprisonnement à l’âge de 15 ans, après avoir manifesté son indignation lorsqu’un français, dans une piscine à Ifrane, traita les Arabes de « chiens ». Dés lors, quand il nous parle de dignité et de combat en faveur de la liberté, on croit en sa sincérité.


Notes :

(1) " L'humiliation à l'ère du méga-impérialisme ", Avant-Propos.
(2) " La décolonisation culturelle, un défi majeur pour le 21e siècle ", Introduction.
(3)- 1931-1994. Fondateur de l'Internationale Situationniste. Philosophe et penseur français de l'extrême gauche.


12 mai 2004


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